Monday, February 26, 2018

ET SI LE VÉLO STATIONNAIRE DEVENAIT UNE QUESTION POLITIQUE ?

Ce post est le prolongement de "Et si le vélo ne se servait plus à se déplacer ?"

Ce post aurait pu être titré "Et si le vélo stationnaire devenait une forme d'asservissement social et politique ?"

Pourquoi cette question à propos d'un objet qu'on a longtemps appelé "vélo d'appartement" ?

Parce que dans l'excellente série britannique "Black Mirror", le vélo stationnaire est au coeur d'un épisode particulièrement troublant sur sa possible nouvelle vocation dans le futur.

Cet épisode - "Fifteen Million Merit"  - décrit, en effet, une société où la majorité des gens doivent faire du vélo stationnaire pour alimenter les villes en énergies et pour gagner leur vie

Les usines de ces nouveaux cyclo-prolétaires ressemblent étrangement aux salle de fitness actuelles : des alignements de vélos devant des écrans diffusant moult jeux et publicités.

Le personnel d'entretien est, lui obèse, et donc moqué et méprisé par les cyclistes, la minceur étant devenue la norme.

Pour le reste de l'histoire, voir la vidéo .

Bref, vous aurez compris que l'on retrouve dans cette distopie tous les ingrédients d'une certaine façon de penser le sport et le travail aujourd'hui sous l'angle de la soumission à une certaine image du corps et à une certaine culture dominante du loisir.

Cela renvoie très directement à "Et si le post-fordism, c'était un homme en mouvement permanent ?" dans lequel on s'interrogeait sur l'idéologie de la mobilité comme nouvel idéal managerial.
"Tous les travailleurs n'ayant pas vocation à être nomades, on peut se demander si afin que tous les travailleurs soient en permanence mobiles, l'idéal du poste de travail de demain ne serait pas un tapis roulant face à un ordinateur ?  
Cette "mobilité statique" (bel oxymore !!) ne serait non plus fondée sur un vrai déplacement, mais juste sur la nécessité du mouvement afin de maintenir les travailleurs en forme et en éveil.  
Si cette nouvelle idéologie devait demain irriguer les imaginaires manageriaux, alors le "parfait travailleur du futur" pourrait être un actif hyper-connecté marchant sur son tapis comme un hamster dans sa roue. C'est terrifiant, mais c'est un mouvement déjà plus qu'émergent - voir "Et si c'était Nike qui réinventait les imaginaires du bureau ?"
Dans ce contexte, l'une des vraies questions sur l'évolution des conditions de travail pourrait être : et si demain la performance professionnelle était indexée sur la performance sportive ?" 
L'aboutissement de cette vision serait évidemment que la salle de sport et le bureau se confondent, d'où nos interrogations récentes sur cette évolution avec

Entre contrôle des corps et organisation du travail, on rejoint nos questionnements "c'est quoi penser la performance demain ?" et "et si la mobilité était le nouvel horizon de la religion industrielle ?"  

On en reparle le 8 juin, .